Caso 2019-007N

Le policier diffuseur d’images antisémites

Ginevra

Cronistoria della procedura
2019 2019-007N L’autorité de poursuite pénale compétente juge le prévenu coupable de discrimination raciale au sens de l’Art. 261bis al. 4 CP.
Criteri di ricerca giuridici
Atto / Fattispecie oggettiva Incitamento all’odio o alla discriminazione (1° comma)
Oggetto della protezione Religione
Domande specifiche sulla fattispecie
Parole chiave
Autori Persone private
Vittime Ebrei
Mezzi utilizzati Scritti;
Documenti sonori / immagini
Contesto sociale Mondo del lavoro;
Reti sociali
Ideologia Antisemitismo

Sintesi

Le prévenu a diffusé 9 photomontages portant atteinte à la dignité humaine des personnes de religion juives sur un groupe WhatsApp. Ces images avaient tous pour objet l’extermination des juives et juifs pendant la deuxième guerre mondiale. Ces photomontages comportent notamment des jeux de mots (« pizza aux enshoah, embarras du Shoah ») et des comparaisons particulièrement choquantes (doigts recouverts de cendre évoqués dans un contexte sexuel, comparaison entre un corps de déporté juif et une pizza, comparaison entre l’Holocauste et des mouvements musicaux).
Le groupe WhatsApp était constitué d’une vingtaine de policiers et policières ayant fait l’école de police avec le prévenu avec lesquels/lesquelles le prévenu n’entretenait pas de relations particulières. Le nombre de personnes présentes dans le groupe variait entre 16 et 20 selon la période.
Le prévenu avait déjà été prévenu en 2014 d’infraction à l’article 261bis CP pour avoir publié sur un réseau social un commentaire à caractère antisémite. L’autorité de poursuite pénale compétente juge le prévenu coupable de discrimination raciale au sens de l’art. 261bis al. 4 CP, parce qu’elle juge ces photomontages comme étant abjects en ce qu’ils banalisent, caricaturent et moquent le génocide des personnes de confession juive lors de la deuxième guerre mondiale. Le critère de publicité est rempli car le prévenu n’avait pas de relations personnelles ou de confiance particulière avec les autres membres du groupe WhatsApp.

In fatto

Le prévenu a diffusé 9 images portant atteinte à la dignité humaine des personnes de religion juive sur un groupe WhatsApp. Ces images étaient des photomontages qui avaient tous pour objet les personnes de confession juive et le génocide dont elles ont été victimes :
· Photographie de l’entrée du camp d’extermination d’Auschwitz avec une enseigne « Free tatoo & shower » remplaçant l’enseigne « Arbeit macht frei ».
· Photomontage mettant en scène Adolf Hitler et deux enfants faisant le salut nazi aux côtés de deux rappeurs américains avec les légendes « EAST COAST », « WEST COAST » et « HOLO COAST ».
· Photomontage d’un uniforme de déporté comportant l’étoile jaune et l’inscription « Jude » avec la légende « Quelqu’un peut me rappeler quelle coupe du monde ils ont gagné les israéliens ? Non parce que l’étoile sur le maillot ça se mérite ».
· Photomontage d’un camp de concentration avec la légende « Auschwitz », montrant des enfants auxquels s’adresse un personnage muni d’un brassard. Ce personnage demande aux enfants s’ils croient au père Noël et leur dit qu’ils vont faire un jeu consistant à imiter le père Noël en passant par la cheminée.
· Photomontage montrant trois officiers SS avec les légendes « ça sent le caramel… » et « Normal, c’est le jour des diabétiques ».
· Photomontage constitué d’une photographie d’Anne Franck avec la légende « Je me souviens d’un jour on a fait les cons au camp et on s’est fait griller… ».
· Photomontage d’un corps posé sur un brancard devant un four crématoire avec la légende « Et une pizza aux enshoah ».
La brigade criminelle informatique a procédé à l’analyse des téléphones portables du prévenu et de certains de ses collègues. Plusieurs images ont été extraites :
· Photomontage d’Adolf Hitler entouré d’officiers allemands avec les inscriptions « Alors on bute qui aujourd’hui ? », « On a l’embarras du Shoah » et « T’es con Adolf ».
· Photomontage montrant deux doigts recouverts de cendre avec l’inscription « Quand tu doigtes une meuf d’Auschwitz ».
Le prévenu avait déjà été prévenu en 2014 d’infraction à l’article 261bis CP pour avoir publié sur Facebook le commentaire suivant : « Crève sale FEUJ ! ». L’autorité de poursuite pénale compétente avait statué une non-entrée en matière car le commentaire du prévenu constituait objectivement une expression de mépris envers les personnes de confessions juive. Toutefois, selon le prévenu, ce commentaire s’inscrivait dans le cadre d’une habitude qu’ils avaient mutuellement prose pour s’adresser l’un à l’autre. Dès lors, l’élément constitutif subjectif de l’infraction n’était pas réalisé.
Le prévenu auditionné par le Ministère public, a déclaré ne pas avoir connaissance de la signification de la Shoah, pensant qu’il s’agissait d’une fête juive.

In diritto

L’autorité de poursuite pénale relève que ces photomontages comportent des jeux de mots et des comparaisons particulièrement choquantes. Ils sont abjects en ce qu’ils banalisent, caricaturent et moquent le génocide des personnes de confession juive sous le régime nazi. Pour un tiers moyen, une telle banalisation des atrocités commises à l’encontre des personnes de confession juive est ressentie comme dénigrante et attentatoire à la dignité humaine de ces personnes. La limite qui sépare l’humour de mauvais goût non punissable de la déclaration portant atteinte à la dignité humaine est largement franchie, selon l’autorité de poursuite pénale compétente.
L’autorité de poursuite pénale compétente a retenu que le prévenu a diffusé les images précitées sur un groupe WhatsApp constitué d’une vingtaine d’anciens élèves de son école de police avec lesquels/lesquelles il n’entretenait pas de relations personnelles particulières et dont le nombre de membres variait selon la période. Ces images n’ont donc pas été diffusées dans un cadre privé. L’autorité de poursuite pénale compétente relève que le prévenu a par le passé déjà été prévenu du chef de discrimination raciale suite à un commentaire antisémite sur les réseaux sociaux. L’autorité de poursuite pénale compétente considère que toute personne ayant bénéficié d’une scolarité élémentaire ou qui participe, comme c’est le cas d’un gendarme, à la vie quotidienne d’une société a déjà entendu parler du génocide des juifs/juives lors de la deuxième guerre mondiale. L’autorité de poursuite pénale considère que le prévenu ne peut donc pas prétendre aujourd’hui ignorer le caractère dénigrant et attentatoire à la dignité humaine des images qu’il a diffusées. L’autorité de poursuite pénale compétente reconnaît le prévenu coupable de discrimination raciale, sur la base des conditions d’application de l’art. 261bis al. 4 CP.


Decisione

L’autorité de poursuite pénale compétente juge le prévenu coupable de discrimination raciale. Le prévenu est condamné à une peine pécuniaire de 90 jours-amende, le montant du jour-amende étant fixé à CHF 150.00 et à une amende de 2'700.00. L’autorité de poursuite pénale compétente met le prévenu au bénéfice du sursis et fixe le délai d’épreuve à 3 ans. L’autorité de poursuite pénale compétente prononce une peine privative de liberté de substitution de 18 jours. Les frais de procédure, à hauteur de CHF 1'860.00 sont mis à la charge du prévenu.