Caso 2020-044N
Vaud
Cronistoria della procedura | ||
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2020 | 2020-044N | Le tribunal de première instance déclare le prévenu coupable de discrimination raciale (Art. 261bis al. 4 CP). |
Criteri di ricerca giuridici | |
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Atto / Fattispecie oggettiva | Discredito o discriminazione (4° comma 1ª metà) |
Oggetto della protezione | Razza |
Domande specifiche sulla fattispecie | Bene giuridico protetto; Pubblicamente (in pubblico); Fattispecie soggettiva |
Parole chiave | |
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Autori | Persone private |
Vittime | Persone nere / PoC |
Mezzi utilizzati | Gesti |
Contesto sociale | Mondo del lavoro |
Ideologia | Razzismo (colore di pelle) |
Le prévenu a de multiples fois imité un singe dans le dos de la partie plaignante de manière publique devant ses autres collègues. Le tribunal de première instance déclare le prévenu coupable de discrimination raciale (Art. 261bis al. 4 CP).
Le prévenu a de multiples fois imité un singe dans le dos de son supérieur hiérarchique, la partie plaignante, de manière publique devant ses autres collègues.
Le prévenu a tenté de justifier son comportement en soutenant qu'.il imite fréquemment le singe au travail pour détendre l'atmosphère alors que son supérieur a déclaré ce jour qu'il ne l'a jamais vu faire de telles imitations, ni face au plaignant, ni face à d'autres employés. De même, le prévenu tente de justifier d'autres propos par une discussion préalable sur l'esclavagisme en général et par sa passion pour l'Antiquité.
Point de vue d’un tiers
Sur le plan objectif, pour apprécier si la déclaration porte atteinte à la dignité humaine ou si elle est discriminatoire, il faut .se fonder sur le sens qu'un destinataire moyen non prévenu lui attribuerait en fonction de toutes les circonstances. Une déclaration publique tombe ainsi par exemple SOUS le coup de l'Art. 261bis al. 4 1ere phrase CP lorsqu'un tel destinataire, au vu de l'ensemble des circonstances concrètes, la comprend dans un sens discriminatoire et que le prévenu avait pris en compte une interprétation de la déclaration dans ce sens.
Le prévenu ne peut pas se justifier au simple motif qu'il considérait personnellement ce geste comme une plaisanterie, et qu'il faisait des gestes de singe en famille depuis son plus jeune âge. Le Tribunal relève à cet égard que ce qui peut être toléré en cercle prive au regard de l'art. 261 bis CP ne l'est pas publiquement. D'ailleurs, aucun témoin n'est venu attester avoir per9u les gestes du prévenu comme une plaisanterie. Au contraire, il y a lieu de retenir qu’un destinataire moyen n'aurait manifestement pas perçu la plaisanterie.
Intention et conscience
Sur le plan subjectif, l'infraction sanctionnée par l‘Art. 261bis al. 4 CP suppose un comportement intentionnel ; le dol éventuel suffit (ATF 123 IV 202 consid. 4c; ATF 124 IV 121 consid. 2b; TF 68_734/2016 du 18 juillet 2017 consid. 6.1 non publie a l'ATF 143 IV 308). Après avoir initialement juge que ce comportement intentionnel devait être dicté par des mobiles de discrimination raciale (ATF 123 IV 202 et ATF 124 IV 121 précités), puis laisse ce point, débattu en doctrine, ouvert (ATF 126 IV 20 consid. 1 d ; ATF 127 IV 203 précité ; TF 6B_398/2Ö07 précité consid. 5), le Tribunal fédéral a récemment tranche la question, en retenant que le comportement de l'auteur devait être dicte par un mobile de discrimination raciale (TF 68_805/2017 du 6 décembre 2018 destine à la publication, consid. 2.3.4). L'acte doit ainsi s'expliquer principalement par l'état d'esprit de son auteur, l'Art. 261bis CP ne devant pas s'appliquer dans le cadre d'une recherche scientifique objective ou d'un débat politique sérieux, exempt d'animosité ou de préjugés racistes (CORBOZ, Les infractions en droit suisse, vol. II, 2ème éd., Berne, 2010, n. 7 ad Art. 261bis CP) » (Arrêt du Tribunal cantonal vaudois du 8 janvier 2019-PE 16.006073).
Race et couleur de peau
La race, au ·sens de l'Art. 261bis CP, se caractérise notamment par la couleur de la peau (STRATENWERTH, Bes. Teil II, Berne, 1995, para 26, p. 167; TRECHSEL, op. cit, Art. 261bis no 11 ; NIGGLI, Rassendiskriminierung, Zurich, 1996, no 368, p. 101) (ATF 124 IV 121 c. 2b).
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Selon la jurisprudence, sont prononcées « publiquement », les allégations qui n'interviennent pas dans un cadre privé. Privées sont celles qui ont lieu dans un cercle familial ou d'amis ou dans un environnement de relations personnelles ou empreint d'une confiance particulière (ATF_ 130 IV 111). Le terme « publiquement » doit être examine différemment selon que l'on se trouve en présence d'actes commis à l'encontre de personnes déterminées (aspect individuel de ces agissements) ou d'actes de propagande raciste vises par les trois premiers alinéas de l'article 261 bis CP. Lorsqu'un acte est instantané et vise en premier lieu une personne déterminée, le critère essentiel qui doit être retenu est celui de savoir si cet acte a été commis devant un ou des témoins qui ne sont pas lies à la victime ou à l'auteur par des relations étroites. II suffit qu'un seul tiers assiste à un outrage raciste pour que celui-ci puisse parvenir à la connaissance du public (arrêt de la Cour de cassation pénale du 9.4.1998 dans la cause F .J. ; Guyat, op. cit., p. 237-239) (Arrêt du Tribunal Cantonal Neuchâtelois du 11.06.1998- Dossier CCP.1998.6615). En l'espèce, le Tribunal tient pour établi que les gestes inappropriés ont été faits en présence de plusieurs collaborateurs. A ce sujet, le prévenu a_ admis qu'il faisait ces gestes devant ses collègues pour amuser la galerie (PV Audience, p. 6). II n'a jamais soutenu avoir été seul avec le plaignant ces jours-là. En l'espèce, le prévenu a imité le singe dans le dos du plaignant devant plusieurs personnes, soit publiquement au sens de la jurisprudence.
Atteinte à la dignité humaine
L'Art. 261bis al. 4 CP vise notamment à protéger la dignité que _tout homme acquiert dès la naissance et l’égalité des êtres humains. A la lumière de cet objectif, constituent un abaissement ou une discrimination au sens de cette disposition tous _les comportements qui dénient a des membres de groupes humains, en raison de leur race, de leur ethnie ou de leur religion, une valeur égale en tant qu'êtres humains ou des droits de l'homme identiques, ou du moins qui remettent en question cette égalité {ATF 131 IV 23 consid. 3). Ainsi, sera un dénigrement punissable le fait d'assimiler les Noirs a des bêtes (ATF 124 IV 121 consid. 2b p. 125) ou encore de faire apparaitre les Juifs comme foncièrement avides d'argent (ATF 126 IV 20 consid. 1f p. 28). II y a ainsi discrimination lorsque le principe de l’égalité est atteint de telle sorte qu'une inégalité de traitement est liée sans motif acceptable a des critères de race, d'ethnie ou de religion et que cela se traduit par des efforts allant dans le sens ou ayant l'effet que les personnes concernées ne peuvent exercer les droits de l'homme qui leur reviennent ou qu'elles sont empêchées ou limitées dans l'exercice de ces droits (Dupuis et al., Petit commentaire du Code pénal, n. 29 ad Art. 261bis et ref. citées) (Arrêt du Tribunal cantonal vaudois du 21 novembre 2016 - PE11.004600). N'importe quelle critique ou la constatation objective d'une différence ne suffit pas ; le message doit atteindre la personne dans sa dignité d'être humain, et ceci en raison de son appartenance raciale, ethnique ou religieuse. Le message doit faire apparaitre les personnes qui appartiennent à une race, une ethnie ou une religion comme étant de moindre valeur du point de vue de la dignité humaine (TRECHSEL, op. cit., art. 261 bis no 22 ; REHBERG, op. cit., p. 184; GUYAZ, L'incrimination de la discrimination raciale, Berne 1996, p. 255; NIGGLI, op. cit., no 767 et 769, p. 204 s.) (ATF 124 IV 121 c. 2b). L'auteur doit rbaisser ou discriminer une personne au un groupe de personnes « d'une façon qui porte atteinte à la dignité humaine ». Cette exigence a manifestement_ pour but de restreindre le champ d'application de la norme pénale. Selon le message, à la différence des délits contre l'honneur, il ne s'agit pas d'une atteinte à l'honneur de la victime. C'est sa qualité d'être humain qui lui est tout simplement déniée (Message du 2 mars 1992 concernant l'adhésion de la Suisse a la Convention internationale de 1965 sur l'élimination de toutes les formes de discrimination_ raciale et la révision y relative du droit pénal, FF 1992 III 265 ss, 308 s. eh. 636.2). Cette interprétation est toutefois trop étroite, comme le relève aussi la doctrine (par ex. Trechsel / Vest, in Schweizerisches Strafgesetzbuch, Praxiskommentar, 2ème éd. 2013, no 34 ad art. 261 bis CP). On doit admettre qu'un rabaissement porte atteinte à la dignité humaine au sens de l'Art. 261bis al. 4 lorsque la personne visée est traitée comme un être humain de deuxième classe (ATF 140 IV 67 consid. 2.5.1) (ATF 143 IV 308).
Imiter le singe dans le dos de son supérieur de couleur alors que ce dernier se retourne tombe sous le coup de cette disposition. Ce geste était non seulement propre à rabaisser et/ou discriminer le plaignant du point de vue d'un observateur moyen en raison de sa race, mais c'est la même le seul sens qu'il était possible d'attribuer à un tel geste, ceci a la lumière des circonstances liées à la personnalité des parties et des circonstances factuelles décrites dans la plainte (P. 4). Il s'est de plus accommodé du fait que son expression pouvait être interprétée dans ce sens par ses collègues présents.
Le Tribunal se réfère aux abondantes décisions et jugements cantonaux répertories par la Commission fédérale sur le racisme (CFR) (https://www.ekr.admin.ch) dont notamment les cas no 2016-008N (GE « Insultes et actes racistes en public « sale négresse » «singe»), no 2016-035N (VD « Racisme anti-noir »), no 2016-037N (GE « sale nègre »), no 2016-040N (VD « Sale noir »), no 2017-008 (GE « Bamboula nègre, va manger des bananes »), no 2017-014N. {« Paroles blessantes et imitation d'un singe»), no 2017-015N (GE « C'est pas un nègre qui va me donner des ordres »), no 2017-023N (VO « Sale noir »), no 2017-028N (GE « Negros tu vas m'enlever cette amende »), no 2018-011 N (FR « Sales nègres » dans un centre commercial), no 2018-017N (FR « Tu as une très belle veste, dommage qu'elle soit portée par un noir »), no 2018-020N (FR « Sale race, sales nègres, sale black, retournez dans votre pays de merde » ), no 2018--026N (VD « Photo de chimpanzé et commentaire dégradant ») et no 2018-034N ( « Insultes à caractère raciste envers une femme noire « sale négresse »).
En l'espèce, le prévenu stigmatise le plaignant en raison de la couleur de sa peau, partant son appartenance raciale et le traite comme un être humain de deuxième classe, partant comme étant de moindre valeur du point de vue de la dignité humaine. Ce geste a bien eu pour but de dénigrer et rabaisser le plaignant.
In casu, il ne fait pas de doute que l'auteur des gestes les a faits intentionnellement, en toute connaissance de cause, dans un but de discrimination raciale. Ceci résulte tant des déclarations des parties que des différents témoignages à la lumière du contexte plus large évoque dans la plainte. En effet, le Tribunal retient par ailleurs pour établi, contrairement aux dénégations du prévenu, que le plaignant lui a fait savoir le 22 mars 2019 déjà que ses propos tendant à évoquer l'esclavage le gênaient, et qu'il devait se rendre compte dès ce moment qu'il ne pouvait pas, dans le cadre professionnel, imiter le singe en présence de la partie plaignante.
Le tribunal de première instance déclare le prévenu coupable de discrimination raciale (Art. 261bis al. 4 CP). Le tribunal condamne le prévenu à une peine pécuniaire de 30 jours-amende à un montant de 30 CHF le jour-amende. La peine est assorti d’un sursis dont le délai d’épreuve s’étend à 2 ans. En outre, le prévenu est condamné à payer une amende immédiate de 270 CHF.