Cas 2006-042N

Propos tenus dans un restaurant: «sale arabe», …

Vaud

Historique de la procédure
2006 2006-042N La 1ère instance acquitte l’'accusé.
Critères de recherche juridiques
Acte / Eléments constitutifs objectifs Abaissement ou discrimination (al. 4 1ère phrase)
Objet de protection
Questions spécifiques sur l'élément constitutif Publiquement (en public)
Mots-clés
Auteurs Particuliers
Victimes Etrangers et membres d'autres ethnies
Moyens utilisés Déclarations orales
Environnement social Lieux publics
Idéologie Racisme (nationalité / origine)

Synthèse

L'’accusé s’'est attablé dans un restaurant avec trois connaissances. Apprenant que le patron du restaurant était tunisien, il a déclaré «Alors vous êtes tous des Mohamed ici», ce qui a été pris sur le ton de la rigolade par les personnes qui ont entendu ces propos. Il a demandé au serveur s'’ils avaient du vin arabe sur le ton de la plaisanterie. Puis les personnes attablées avec l’'accusé ont discuté de l’'École Hôtelière, évoquant le fait qu’«il est dommage qu'’en Suisse il n’'y ait plus que des étrangers qui servent» et que «la restauration suisse a du plomb dans l’'aile». Sur quoi, un serveur s’'est mêlé à la discussion. Le ton est monté. Des propos ont été échangés de part et d’autre. Si l’'accusé, qui avait déjà passablement bu, a traité un des serveurs de «sale arabe», il a également été traité de «vieux connard suisse». A un moment donné, l’'accusé, qui s’'est senti menacé parce que le ton était monté et que plusieurs personnes s'’étaient mêlées à la discussion qui dégénérait, a dit qu'’il n’avait pas son natel pour appeler la police. Un serveur a alors lancé un natel sur la table qui s’'est cassé. L’'accusé a alors payé les consommations et est sorti du restaurant avec ses amis. La voiture de l’'accusé a été bloquée puis la police est arrivée. Lors de l'’intervention, le lésé a confirmé que l'’accusé avait proféré des injures. Par la suite, il s’'en est pris verbalement à l’'accusé, qui lui a alors répondu en le traitant de «sale arabe», ce qui a été rapporté par l'’agent qui est intervenu sur les lieux.

Devant la 1ère instance, la conciliation a abouti. L'’accusé a présenté ses excuses au lésé qui les a acceptées. De plus, l’'accusé s’'est engagé à verser un montant de CHF 500.- à titre de don à une organisation.

Le juge considère que les propos «Alors vous êtes tous des Mohamed ici» n'’étaient pas attentatoires à la dignité humaine. S’'agissant des propos «on n'’est servi que par des étrangers», il fallait admettre que, précédé de «c'’est vraiment dommage», ils étaient à mettre en relation avec «la restauration suisse a du plomb dans l’'aile» et que ces propos n’'entraient pas dans le cadre de l'’article 261bis alinéa 1 CP dans la mesure où ils n’'étaient pas destinés à être entendus par des tiers. Les propos «sale arabe» et «vieux connard suisse» ont été échangés pour porter atteinte à l’'honneur et non pas à la dignité humaine et ne tombent donc pas sous le coup de l’'Art. 261bis alinéa 1 CP. Quant aux propos échangés lors de l’'intervention de la police, il y avait lieu de constater que l’'exigence de la publicité faisait défaut. Tous les propos échangés ne tombaient ainsi pas sous le coup de l'’Art. 261bis al. 1 CP. L'’accusé a dès lors été libéré de l’'accusation de discrimination raciale.

En droit / considérants

Devant la 1ère instance, la conciliation a abouti. L'’accusé a présenté ses excuses au lésé qui les a acceptées. De plus, l'’accusé s'’est engagé à verser un montant de CHF 500.- à titre de don à une organisation.

La 1ère instance constate que, dans un premier temps, la discussion s'’est déroulée entre les personnes qui étaient attablées avec l'’accusé et qu’elle n’'était pas destinée à être entendue par des tiers.

S’'agissant des propos «Alors vous êtes tous des Mohamed ici», elle considère qu’évoqués sur le ton de la plaisanterie, à ce stade, ils n’'étaient pas attentatoires à la dignité humaine.

Ensuite, s’'agissant des propos «il est dommage qu’'en Suisse il n'’y ait plus que des étrangers qui servent», ils sont à mettre en relation avec «la restauration suisse a du plomb dans l'’aile» et, si cela a pu être provocatoire, ces propos n’'étaient pas destinés à être entendus par des tiers.

Par la suite, le tribunal souligne qu'’il est difficile de savoir quels propos ont vraiment été échangés de part et d'’autre lorsque des serveurs se sont mêlés à la discussion, malgré le fait que l'’accusé leur ait dit que cela ne les regardait pas. Il retient que des propos à connotation raciste on été échangés de part et d’'autre à ce stade. Il considère toutefois que ces propos ont été échangés pour porter atteinte à l’'honneur et non pas à la dignité humaine.

S’'agissant des propos échangés à l’'extérieur lors de l’'intervention de la police, la 1ère instance constate que l'’exigence de la publicité fait défaut, à savoir que l’'acte n'’a été commis que devant des personnes qui étaient liées à la ou les victimes ou à l’'auteur.

Le tribunal déclare donc que tous les propos tenus ne tombent pas sous le coup de l’'Art. 261bis al. 1 CP. L'’accusé doit donc être libéré de l’'accusation de discrimination raciale.

Décision

L’'accusé est libéré de l'’accusation de discrimination raciale.