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Hasan Kanber est membre du comité central de la FVNWS et dirige bénévolement depuis 2002 la commission d’intégration de cette association.
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Il y a seize ans, l’Association de football de la Suisse du Nord-Ouest (FVNWS) a mis sur pied une commission d’intégration ; c’est la seule association régionale de football en Suisse à disposer d’une telle structure. Près d’un tiers des membres de la FVNWS sont des clubs de migrants. Entretien avec Hasan Kanber, directeur de cette commission.
L’intégration a toujours été un thème prioritaire pour moi. Le meilleur moyen de s’intégrer est de s’investir concrètement, notamment dans le sport. C’est exactement ce qui s’est produit dans mon cas : j’ai commencé à jouer au football en étant jeune et cela m’a ouvert les portes d’une association. Tout s’est fait très simplement, très naturellement. Et cela peut fonctionner pour chacun d’entre nous, d’où que nous venions.
La FVNWS regroupe 104 clubs du Fricktal, de Bâle-Ville, de Bâle-Campagne et de Soleure, dont un tiers environ sont des clubs d’« étrangers ». Nous agissons de l’intérieur en aidant ces clubs à améliorer leurs structures. Pour nous, il est important que les assemblées générales prévues dans les statuts soient effectivement organisées, que les processus soient transparents et que les personnalités fortes n’occupent pas toute la place.
Délégué à l’intégration, je fais aussi office de traducteur et de médiateur. Notre association agit surtout au niveau de la prévention, notamment lors des matchs à haut risque. Ce genre de rencontres, notamment celles opposant un club de la communauté kurde à une équipe composée de nationalistes turcs, peut occasionner des tensions. Dans ce cas, nous nous rendons sur place avec la commission de jeu le jour du match. Souvent, le simple fait de savoir que nous sommes présents suffit à calmer les équipes. Si nous constatons que des discours de haine sont diffusés sur les réseaux sociaux avant le match, nous pouvons également l’annuler. Mais cela arrive tout au plus une fois par saison.
Nous agissons aussi vis-à-vis de l’extérieur. Notre association régionale compte près de 15 000 joueurs actifs. Il est important que nos membres soient considérés comme des membres à part entière de la société civile. Aujourd’hui, le sport est aussi perçu comme un vecteur de promotion de la santé et nous nous considérons partie prenante de la politique en matière de sport et d’activité physique. Nous tenons à être reconnus comme tel. L’État ne doit pas seulement poser des exigences aux associations et leur imposer des responsabilités. Si, en parallèle, il coupe les subventions aux associations sportives, il est en contradiction avec ses objectifs proclamés en matière de promotion de la santé.
Pour les personnes issues de la migration, le football revêt une importance particulière : ce sport est bon marché et populaire, il est pratiqué par toutes les couches de la population. D’autres sports, comme le tennis ou le handball, sont surtout pratiqués dans les couches sociales favorisées et devraient se demander comment plus s’ouvrir aux migrants.
Au cours des seize dernières années, nous avons réussi à attirer l’attention du public sur la problématique de l’intégration. Nous sommes reconnus et pris au sérieux, les autorités nous impliquent dans leurs décisions et nous sommes régulièrement invités à des manifestations. Il faudrait toutefois atteindre une plus grande mixité dans les clubs. Je comprends le besoin des migrants de jouer avec des gens de leur origine. Mais il faut éviter tout cloisonnement.